Avant tout connu en France pour ses poésies mystiques, ses essais torturés et ses questionnements religieux, Miguel de Unamuno (1864 – 1936) est encore bien plus que cela. Écrivain et penseur prolifique, littéralement inclassable, auteur de romans conceptuels, satiriste passant du tragique à l’humour le plus simple, précurseur de l’existentialisme (Unamuno était un grand lecteur de Kierkegaard, qu’il lisait en danois), exilé par le régime dictatorial de Primo de Rivera dans l’entre-deux guerre, représentatif de ce que l’on a appelé la génération de 1898, avec Antonio Machado, homme passionné trouvant son moteur artistique et philosophique dans ses contradictions, il est un point de passage obligé dans la culture espagnole et plus généralement européenne de son époque. Dans le domaine de la pensée, sa grande œuvre est peut-être le Sentiment tragique de la vie (1912), autour duquel gravitent de nombreux écrits d’importance comme l’Agonie du Christianisme (écrit en exil à Paris en 1925). Figure solitaire qui a toujours refusé la fuite et l’isolement, poète en marge des modes, écrivain et penseur rejeté par toutes les chapelles, injustement tombé dans l’oubli pour le public français, il est un de ces grands intellectuels incarnés qui nous permettent d’aborder la vie autrement, comme le disait son maître Kierkegaard, qu’à travers les récits des professeurs.